Comment une plante si courante peut-elle avoir autant d'utilisations ?
Toutes les vertus lui sont confiées, mais attention il en existe quand même 70 espèces différentes. Utilisée dès l'antiquité elle est à la fois tonique par sa racine, sédative en huile essentielle, digestive. On en fait des confiseries, des liqueurs, bref tout un arsenal. Pour la distinguer de la ciguë, avec laquelle on pourrait la confondre, il suffit de broyer quelques feuilles : l'Angélique est parfumée, et peut être utilisée comme telle, la ciguë par contre empeste.
Rare dans nos jardins mais utilisée à titre ornemental, l’angélique fut surtout cultivée pour ses vertus médicinales. Son nom latin Angelica archangelica est évocateur » l’herbe aux anges » ou » Herbe du Saint-Esprit « .
Un peu d’histoire
On la dit évoquée par Pline le Jeune, figurée sur les pièces de l’antique Lybie et cultivée dans l’Egypte ancienne 3000 ans avant notre ère. Certains latinistes en distinguent plusieurs variétés dont le nom de l’une évoquerait plutôt la férule qui servait à fouetter les esclaves, l’autre un remède.
Ce qui reste sûr : sa présence dans le Grand Nord ! Nous aurait-elle été apportée par les Vikings après la fondation de l’empire russe ? L’avaient-ils au départ ou bien l’ont-ils trouvée sur leur chemin en Russie ??? d’où son autre nom » Herbe de Bohème « .
Une chose est certaine, on trouve l’angélique dans les jardins des monastères d’Europe en l’an 1000.
Par contre, le mystère de son arrivée dans le Marais Poitevin n’est toujours pas percé !
Pendant plusieurs siècles, cette » herbe » est utilisée à la fois par les apothicaires et les sorciers !
Lorsque Niort connut La Peste dite le » mal noir « , on fit ce que firent les italiens touchés par ce mal avant nous, on eut recours à l’angélique : feuilles mâchées, décoction, colliers de graines autour du cou des enfants. Et la peste disparut. De là à faire de cette plante une médicinale et une herbe magique, le pas est vite franchi !
On sait depuis que l’angélique est un répulsif pour les rats et les puces, vecteurs premiers de la peste !
Comment consommer l’angélique ?
On prête mille vertus à l’angélique : Elixir de longue vie, – un homme affirme avoir atteint 120 ans après avoir quotidiennement chiqué de la racine d’angélique – vertus aphrodisiaques, cicatrisantes, vertus de guérir la typhoïde, les morsures de serpents et de chiens ou bien de soigner les blessures à l’arme blanche quand elle est mise en pommade.
Elle entre dans le domaine culinaire grâce aux religieuses qui créent la » confiture » au sens de » fruit confit » et aux moines qui l’intègrent à la Bénédictine, la Chartreuse, l’Eau de Mélisse des Carmes. On la trouve aussi dans la composition de l’absinthe !
Elle connaît son heure de gloire au XIXe avec les sculptures d’angélique.
Tout se consomme : la grosse tige qui peut atteindre 2 m ou bâton, pour la confiserie. Les tiges plus fines sont utilisées pour les sirops, gelées, bonbons. Les feuilles dentées peuvent être mâchées. Les graines en ombelle blanche entrent dans la composition de crème. Les racines sont récoltées pour fabriquer l’huile essentielle utilisée par les parfumeurs (une tonne de racines serait nécessaire pour un litre d’huile). Son parfum est unique.
L’angélique : remède ou poison ?
L’Angélique reste remarquable au niveau digestif : ballonnements d’estomac, problèmes intestinaux, biliaires. Elle est prescrite contre l’anémie, les migraines, la dépression, dans les sirops contre l’asthme, la bronchite.
Mal utilisée, de remède elle deviendrait poison en cas de diabète, tension artérielle, ou pour les femmes enceintes.
Un adoucisseur d’eau naturel : pour la douceur de la peau. Prenez des feuilles fraîches d’angélique et mettez-les dans un tulle que vous nouez et placez sous le robinet d’eau.
Le « prince des gastronomes », Curnonsky évoque l’angélique !
Mais la pratique la plus originale, reste celle évoquée par le grand Curnonsky, intitulée » Angélique à la Sybarite « .
Le » sybarite » est une personne à la vie facile, voluptueuse, recherchant les plaisirs de la vie dans le luxe et le raffinement !
» Ayez au chaud, sous un cosy ou sur un réchaud, une douzaine de fines brioches, un compotier empli de bâtons d’angélique confite de Niort, plus une bouteille de crème d’angélique, exquise liqueur trop peu connue, une carafe d’eau frappée et une boîte de cigarettes Ferezli de Perse ou ambrées du Caire.
Allumez une cigarette, buvez une gorgée d’eau glacée, croquez un morceau d’angélique avec une bouchée de brioche quasi brûlante ; ensuite, humez, aspirez et distillez dans votre bouche quelques gouttes de la liqueur charmante que suivra une gorgée et une goulée de blond et odorant tabac. Puis avalez encore quelques gouttes d’eau, croquez angélique et brioche toujours chaude et continuez avec toutes ces alternatives jusqu’à ce que brioches, angélique et crème d’angélique soient achevées ; et pour peu que la pièce soit vaporisée d’un parfum frais et léger ou poivré, on saura quelle béate jouissance peut donner un discret sybaritisme.